dimanche 5 juillet 2015

STEFANO SECCO, ténor, 07/2015.


    « S’avanza il re » chante Oscar/Kathleen Kim et Gustav III/Stefano Secco entre en scène. C’est au tout début de « Un Ballo in Maschera » de Verdi, version Royaume de Suède (mes. Alex Ollé), en streaming sur le site de La Monnaie en juin 2015.
Disparu de mon écran-radar depuis un Hoffmann radieux, entendu à Bastille en 2012 (Offenbach/mes. Robert Carsen), Stefano Secco y revient dans un rôle qui lui tombe sans un pli dans la voix. En trois ans l’évolution du chanteur-acteur est saisissante. S’il a toujours pris son chant à-bras-le-corps, son tempérament fougueux s’est aujourd’hui enrichi d’une sereine assurance, qui n’omet pas pour autant un excellent contrôle vocal. Son théâtre, souvent intense, a visiblement gagné en cohérence par une meilleure concentration des émotions du jeu et de la musique. La voix s’est élargie, le timbre est plus dense. Maintenant ce soleil a des reflets cuivrés. S.Secco est entré en maturité, par les rôles et par l’âge. Je suis éblouie par la synthèse faite des éléments qualitatifs de sa technique vocale, particulièrement remarquable dans son récit et air :
« Forse la soglia attinse…ma se m’e forza perderti » à l’ActeIII/Scène2 de ce « Ballo » !
Flash-back…
En 2008 dans le « Rigoletto » de Verdi entendu à Bastille (mes. Jérôme Savary), le « buon canto » soigné et pétillant d’un Duca Di Mantova latin en diable attire mon oreille. Le souffle est long, la voix bondit sur un soutien solide et maniable, les aigus insolents se jouent d’un passage maîtrisé.
26 avril 2009, toujours à Bastille et dans le « Macbeth » de Verdi (mes. Dmitri Tcherniakov), le même S.Secco porte la plainte immensurable de Macduff dans un « Ah la paterna mano » inoubliable. Legato sans faille, inflexions stylées et nuances généreuses servent une interprétation ô combien sensible et sincère.
Passons à son Rodolfo de « La Bohème » de Puccini, 18 novembre 2009/Bastille/mes. Jonathan Miller. Le cœur de son poète d’amour et de désespoir explose dans les longues lignes de chant pucciniennes. Le timbre clair et frais a les mille couleurs de la jeunesse. La dégaine est décontractée mais le phrasé reste rigoureux.
Certes, S.Secco aime voyager dans d’autres répertoires, dont Puccini, mais revenir à Verdi me paraît essentiel en ce qui le concerne. Lumineux dans ses déchaînements d’héroïsme comme dans son lyrisme romantique en Infant Don Carlo (Bastille/14.03.2010/mes. Graham Vick), il me convainc de l’inclination de son talent pour la musique du Maestro di Busseto. Sa diction italienne, étudiée notamment avec Renata Scotto, sert exactement le théâtre verdien. Elle est pour moi l’égale de la diction française de Roberto Alagna. Tonicité du mordant ou cantabile soyeux, son Italien demeure limpide, supérieur. Respiration fondamentale apprise avec Franco Corelli (Opéra Magazine n°48/Michel Parouty), chant « di slancio » bouillant, gloire et couleurs des aigus, registres unis et confortables…tout est bon chez notre ténor milanais pour célébrer l’appétit dramatique de « Big Boss Peppino ». Oui, Verdi et Secco se comprennent à demi notes !
Autre caractéristique réjouissante, quel que soit le compositeur interprété, le « canto secchiano » accorde une égale importance au rythme et à la mélodie dans sa construction du discours musical. Cette voix contient en elle les forces de la danse, peut-être l’empreinte de ses études de percussionniste professionnel auprès de Tullio Di Piscopo.
Avec cette opiniâtreté qui se lit dans le regard et dans le geste, avec cette saine manie de mordre dans son art à pleines dents, avec la classe de l’artiste qui paye toujours cash sur scène, Stefano Secco sera bientôt Rodolfo dans « La Bohème » à Turin en juillet 2015 et Mario Cavaradossi dans « Tosca » à Venise en septembre 2015. Deux de ses Puccini où tendresses ondoient et passions flamboient. En attendant la sortie de son premier album solo « Crescendo », chez Delos en novembre 2015 (voir son site).

                                                                        *********

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire