lundi 27 juillet 2015

UN BALLO IN MASCHERA de Verdi, mes. Jean-Claude Auvray - Chorégies d'Orange/06.08.2013/France2 -


   Patchwork construit, paraît-il, à partir de la générale et des représentations du 3 et du 6 août, il est fort difficile de parler de la mise en scène de Jean-Claude Auvray dans cette retransmission/France2/06.08.2013 de Un Ballo in Maschera de Giuseppe Verdi aux Chorégies d’Orange/2013. Le sentiment d’une qualité inégale de mise en scène vient-il de ce découpage télévisuel ? L’acte II semble particulièrement inabouti scéniquement : Amelia et Riccardo tournent en rond, perdus sur l’immense plateau des Chorégies, volontairement et vertigineusement dénudé. En revanche, toute la fin de l’acte I, dans l’antre d’Ulrica et l’acte III, à partir de l’air solo de Riccardo jusqu’à sa mort, fonctionnent parfaitement.
Les mises en scène épurées de Jean-Claude Auvray utilisent le vide comme mise en relief de l’action dramatique et recherchent méticuleusement l’osmose musique et scénographie par un laisser-vivre du chant sur le plateau. Mais, si c’est remarquablement réussi dans cette Forza del Destino aux clairs-obscurs lancinants à Paris/Bastille en 2011, cette quête de dépouillement tombe dans l’excès, alliée au gigantisme de la scène des Chorégies, constat pour Un Ballo in Maschera/2013 et Cavalleria Rusticana/2009.
Malgré cela, d’attachants souvenirs visuels demeurent après ce « ballo » : le cheval à bascule du gamin d’Amelia et de Renato, l’énorme globe blanc imprimé de caractères ésotériques et zodiacaux et les merveilleuses projections virtuelles de cartes du ciel chez Ulrica, la maquette de l’Opéra Royal de Suède et son somptueux rideau de scène bleu, peint à même le sol qui, couplé aux très raffinés costumes jaune pâle des invités au bal, nous rappelle le drapeau suédois…
   Les liens du cœur, eux, vont à la musique de Verdi, « musique qui n’hésite pas à sacrifier l’unité du style à la diversité psychologique des personnages. Riccardo, Renato, Amelia, Oscar, Ulrica ont leur langage mélodique et rythmique propre dont l’alternance ou la superposition aboutit à des climats variables d’une scène à l’autre » (dans Giuseppe VERDI, Ed. Julliard, 1978, Jacques Bourgeois). Là réside le secret de l’émouvante beauté du Ballo in Maschera. Alain Altinoglu et l’Orchestre National de Bordeaux-Aquitaine l’ont bien compris et cisèlent avec talent cette écriture en entrelacs.
Lumineux Riccardo/Ramon Vargas ! De 2009/Paris-Bastille à 2013/Orange, dans ce même rôle, la voix de ce ténor enchanteur a toujours la tendresse du bon pain et l’élégie dans l’âme. Tout est bon dans sa technique, il n’y rien à jeter -la liste des louanges serait bien trop longue à établir.
« Splendidissimo » Oscar/Anne-Catherine Gillet ! En 2010, j’écrivais à son propos : « Lola aguicheuse, adorable Vincenette ou touchante Sophie, Anne-Catherine Gillet, à la ligne de chant sûre et stylée, au jeu efficace, quand serez-vous Oscar ? Oscar, vous le « travaillez » probablement pour vous. C’est ce rôle que j’entends dans votre voix, chaque fois que je vous écoute. » Du rêve sonore à l’inoubliable incarnation…L’Ulrica de Sylvie Brunet-Grupposo a la densité et la préciosité de l’orchidée. La robe si prune de son timbre est idéale pour notre devineresse, new-look chez Jean-Claude Auvray. Le riche velours du lyrico-spinto de Kristin Lewis séduit et convainc par son amplitude magnifiquement maîtrisée. Lui font défaut la souffrance morale , le déchirement intérieur d’Amelia. Seul point noir de la distribution, le Renato de Lucio Gallo. Maladie ? Vieillissement vocal ? Que lui est-il arrivé en l’espace de deux ans ? Son Iago (Otello à Paris/Bastille en 2011), son Michele et son Gianni Schicchi (Il Trittico au Royal Opera House en 2011) étaient formidables. Stupéfaite par cet état vocal défaillant. Du mal à l’écouter. Des comprimari fort bien chantants : Paul Kong, Nicolas Courjal et Jean Teitgen.
   C’est tant de bonheur de pouvoir venir s’abreuver à la source verdienne, encore et toujours…

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