jeudi 6 août 2015

IL TURCO IN ITALIA de Rossini, mes. Christopher Alden - Aix/11.07.2014/Arteconcert -

                             
   Il Turco in Italia (Rossini) du Festival d’Aix/2014 a jeté l’ancre au Théâtre de l’Archevéché pour la réjouissantissime représentation du 11 juillet, sur Arteconcert.
   Quid de la mise en scène de Christopher Alden ? « Marthalérienne » (di qua), « rien » (di la),
« jubilatoire » (si, si ! ), « potache » (aussi), « intelligente » (ah oui ! ). Ainsi gazouillent nos gazettes… Permesso ! La direction d’acteurs de C.Alden est soignée aux petits oignons et domine l’ensemble de cette production. Le cocon esthétique dans lequel s’ébattent nos trublions rossiniens en devient presque secondaire tant nous sommes happés par la force de leurs personnages.
Le plus épatant est le Prosdocimo de Pietro Spagnoli, incontournable fil conducteur de cette affaire. C’est le poète en mal d’inspiration qui tire des évènements autour de lui le texte du dramma buffo qui lui a été commandé, tout en s’autorisant à orienter l’avenir de ses héros bien réels. Tout de silence et de chant, de mime et de contemplation, les mains volant dans les airs ou en rythme sur sa petite machine à écrire (qui ne fait pas de bruit sur Arteconcert !), le regard toujours en éveil, un corps très expressif, P.Spagnoli nous embarque dans ses élucubrations d’écrivain, musicien impeccable et grand comique. Son compère en « italianità » est « THE » maestro di sillabato, l’inusable et encore frais Alessandro Corbelli, ici Don Geronio. C’est toujours par le sérieux le plus invraisemblable que A.Corbelli se transforme en buffo absolu pour nous surprendre. Mais le turco un beau jour débarque. Le Selim de Adrian Sâmpetrean a tout du beau gosse de banlieue. Pourtant son ramage vaut largement son plumage. Toute la technique du séducteur rossinien dans les notes et dans le jeu. « Bella Italia alfin ti miro » et « Perchè una fiamma insolita » (ActeI/ScèneVI) nous révèlent les profondeurs d’un timbre sombre et grisant. La Fiorilla d’Olga Peretyatko ne s’y est pas trompée, elle qui, délaissant son barbon de mari Don Geronio, poursuit notre turc de ses charmes irrésistibles. Œil vif, aigus assassins, rubato de la hanche, sexy-épanchements, vocalises con fuoco, Olga brûle coeurs et planches de son Rossini décapant. Narciso/Lawrence Brownlee soupire après la belle Fiorilla, qui ne fait pas cas de lui. Ici, Narciso est un malade mental léger dont le haut du corps reste voûté et figé dans ses déplacements. Chanter ce rôle dans une telle mise en scène s’avère difficile, la position corporelle demandée n’étant pas recommandée pour un buon canto. L.Brownlee relève le défi et nous émerveille par sa saisissante incarnation. Parfois on remarque tout de même moins de brillance et d’insolence dans la voix qu’à l’accoutumée. Et c’est finalement la plus moche de tout le quartier, Zaïda/Cecelia Hall, qui fait chavirer le cœur du beau gosse Selim. Joli mezzo, semblant manquer de confiance en elle, C.Hall s’améliore nettement au cours de la représentation. L’enthousiaste Albazar de Juan Sancho, soupirant délaissé par Zaïda, nous touche par ses talents scéniques, malgré une technique vocale encore jeune. Zingari et Coro, l’Ensemble Vocal Aedes fait montre d’un métier solide.
   Mis à part quelques décalages vite surmontés, Marc Minkowski et les Musiciens du Louvre/Grenoble nous délivrent un Rossini bien balancé. Mille sentiments, rondeurs, couleurs, pointes d’ironie, mais manque un zeste de légèreté.
   Un DVD me semble indispensable, essentiellement pour l’excellence des chanteurs-acteurs.

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- Dépôt SACD n°277418 -
                                                         






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